Leur nom est sur les lèvres de tous ceux qui voient le talent arriver de loin. Bientôt, leur électro libre sera partout. Pourtant, on ne sait pas grand-chose d’eux hormis qu’ils veulent en dire le moins possible. Ce qui, en marketing moderne, est déjà beaucoup. Fidèles à la tradition d’anonymat (relatif) qui prévaut sur la scène dance, ces trois Australiens estiment, à juste titre, que leurs chansons sont plus importantes qu’eux et préférables aux longs discours biographiques. On se contentera donc de signaler qu’ils se prénomment Vincent, Andy et Daniel, mais ont décidé, comme les Ramones (avec qui ils partagent un goût prononcé pour les plaisirs immédiats), de tous s’appeler Juggernaut. Vincent et Andy Juggernaut se sont rencontrés à l’école, à Melbourne, et ont commencé par sévir dans un groupe de rock basique avant d’évoluer vers une dance pop qui, depuis quelques maxis et remixes, fait se pâmer leurs pairs et les amateurs du genre. Depuis plusieurs mois, les Midnight Juggernauts ont attiré l’attention en remixant des titres pour !!! (Chk Chk Chk), The Presets, Dragonette, Electric Six et Damn Arms. Ils figurent aussi en bonne place sur de nombreuses compilations et ont déjà tourné avec Scissor Sisters ou Bloc Party. Bien inspirés, les Midnight Juggernauts ont récemment abandonné les tenues de scène de leurs débuts (des costumes de dictateur…) pour s’habiller comme leur public, jeune, bigarré et très porté sur la fête. Vincent et Andy ont également fini par trouver le batteur dont ils rêvaient en la personne de Daniel Stricker, devenu Daniel… Juggernaut ! Paru l’été dernier en Australie sur leur propre label, “Dystopia”, le premier album des Midnight Juggernauts, réunit une douzaine de chansons pop flamboyantes très inspirées par Electric Light Orchestra mais pas seulement. Au détour d’un refrain, dans un coin d’arrangement, au creux de la voix de Vincent, on constate la présence d’influences diverses et variées : Air, M83, le Bowie de “Low”, Can, Bauhaus, New Order, Giorgio Moroder, etc. Mais au-delà des allusions, c’est la réelle personnalité musicale du trio, qui se dit investi d’une mission galactique (?), qui fait surtout on charme : “Dystopia” auquel, en signant avec EMI France, les Midnight Juggernauts entendent bien donner une exposition mondiale, brille par la qualité intrinsèque de ses mélodies entêtantes, son éclectisme de ton, ses vocaux angéliques et ses ambiances sonores proches, parfois, de celles des films de John Carpenter. A des kilomètres des bidouillages mesquins de certains, ces explorateurs sonores voient grand et osent des suites d’accords en relief, des décharges éclectiques, et des retours vers le paradis. Appréciés par Justice ou Daft Punk, ils en ont la puissance et la grâce. “Into The Galaxy”, “Road To Recovery” ou “So Many Frequencies”, même si elles risquent de faire un malheur sur les pistes de danse européennes, raviront également les amateurs de pop et de rock sans œillères qui apprécieront certainement de surfer sur ces vagues bien plus hautes que la moyenne, la tête dans cette disco d’ailleurs un brin nostalgique.