« Tu ne vis que pour le sexe, Henry ». On doit cette réplique lapidaire et clairvoyante à Hortense, copine de collège et « première fois » d’Henry, début prometteur des plaisirs du sexe et de l’amour, ses deux centres d’intérêts. Au cœur d’une famille en miettes, le jeune ado observe des adultes, ombres d’eux-mêmes, retournés comme des gants, qui se débattent entre la banalité crasse du quotidien et l’angoisse d’avoir à se poser les vraies questions. Il peaufine aussi son éducation « sentimentale » grâce aux conseils avisés de Martin, son trentenaire de frère. Ce dernier, « qui montrait ses chemises dans tout Paris » est revenu vivre chez ses parents vidé par la rupture, démoli par l’adultère ; il ressasse sa déchéance amoureuse dans un mobile-home au fond du jardin consommant tout ce qui peut faire oublier.

Tous les thèmes de Nicolas Rey – qui sont aussi ceux d’un Beigbeder ou d’un McInerney par exemple – sont bien là : l’extraordinaire énergie de l’adolescence comme apogée de la vie, le caractère déterminant des premières fois, la trentaine désenchantée, le plaisir éphémère et formateur du sexe, la dépense et la fuite dans la dope, les petits riens qui anesthésient les désillusions des postadolescents…Oui, être adulte est décidément « un dur métier ». Après Treize minutes et Mémoire courte, ce troisième roman porte bien son nom, on sent que Nicolas Rey en a léché le style, soigné la progression et la construction, qu’il y a creusé le sillon de la désillusion avec une rare acuité, un humour dévastateur et son sens habituel de la formule. Il signe peut-être bien là son premier vrai début… vraiment prometteur. — Claire Pardieu  Un jour, tu comprendras. Le frigo des filles et tout ça. Celles qui accumulent les Diet Coke, celles qui collectionnent les jus d’orange survitaminés. Tu comprendras les crèmes épilatoires, les salles de bains avec ou sans baignoire, le sérum physiologique pour les lentilles de contact, le petit fil blanc ou bleu qui dépasse quelques jours par mois. Et le frigo des filles, la façon dont elles rangent et cartonnent au jeu des sept familles, jamais, jamais tu m’entends, en six ans de vie commune, je n’ai vu une plaquette de beurre à côté d’une bière ouverte ou d’une confiture périmée dans un frigo. Je vais te dire Henry, dans un frigo de fille, la nonchalance n’existe pas. De Nicolas Rey www.amazon.fr